LE FUTUR LEUR TOMBE DESSUS
Moteur Cailloux (Laure Wauters + Demi-Tour de France)
2019.5.17 - 2019.5.26
Elles ont marché autour, appris que Pantin était matière à construction. Dans les vestiges du quotidien : des téléphones, du Capri Sun ou un grand cadre en bois qui fait paroi, porte et portail à la fois. Elles ont six mains et remontent loin.
L’atelier W les a accueillies du 17 au 27 mai 2019 afin qu’elles mettent en œuvre des choses pensées depuis longtemps. Il y a l’archive sauvage, l’autrefois de chaque ici où elles se posent, les mille fenêtres du regard qui cherche à capter ce qui ne se dit pas. Elles ont comme nous très peur de ce qui va se passer mais Le futur leur tombe dessus est une exposition, c’est-à-dire une exploration par les moyens de l’art qui interroge, reformule et tire des fils auxquels se rattacher, une étape dans un chemin. Une reproduction de mammouth peut dialoguer, de loin, avec une cartouche de LBD explosée ou un verre à moitié plein. Une façade et des fenêtres sont photographiées, encadrées de PVC blanc, poignée, fenêtre trouvée. Des ruines ont été produites, elles hantent quand même. Demi Tour de France (Marie Bouthier et Anouck Lemarquis) et Laure Wauters sont les trois artistes de « Moteur Cailloux ». Outre la collecte, le geste de concevoir un univers en écho à celui qui accueille et celui de produire, qui en découle parfois, il y a le temps de la lecture. Une collection d’ouvrages se présente sur une étagère, bibliothèque pour qui veut bien s’installer. Certaines pages ont été prélevées, puis figées dans de la cire, convoquant la notion de palimpseste qui va si bien avec le temps du chantier. L’exposition est l’arrêt sur image d’un en cours, déterminé par l’espace et le temps d’une présentation. Le Futur leur tombe dessus parle d’un paroxysme, de tous les déjà-là qui nous assaillent. Un pronom crée la distance. Pronom dont on ne sait s’il qualifie les femmes qui sont les artistes qui sont l’appellation qui signe l’œuvre ou s’il désigne d’autres encore que le public est invité à observer avec les créatrices, à travers leur prisme. Constat d’un indéniable qui vaut pour tous, le futur ne se prédit pas à moins que : il y a plusieurs portaux, du seuil de l’atelier à la paroi de bois-béton au dos de laquelle irradie un néon. C’est là le sas, il faut y croire. Entendons bien, rien n’est totalement acté et si le futur tombe, il n’est pas dit que l’on y succombe : les plantes prélevées dans le macadam alentour ont trouvé de quoi renaître dans la fraîcheur du plâtre sensé les figer.
Jeu d’échelle, l’exposition s’articule comme un espace qui s’habite, qui demande qu’on l’investisse comme on enfilerait un costume, prêts tantôt à voyager dans le temps, tantôt à rire ou à frémir, à réfléchir et à sentir. Moteur Cailloux nous emmène loin du narcisse qui s’exhibe pour exister, il faudrait dire qu’elles jouent le jeu.